31 mars 2002 : ces synagogues que l’on brûle

En 2002, la deuxième Intifada en Israël et la construction « d’une barrière de sécurité » sont prétexte à une série d'incidents antisémites en France.

Le dimanche 31 mars 2002 vers 9h15, les flammes cessent de brûler les portes de la synagogue de Strasbourg située dans le quartier populaire de Cronenbourg. Lqe rabbin découvre des portes calcinées et un hall considérablement abîmé par les fumées d’hydrocarbures de cet incendie criminel. Mais l’air de cette synagogue incendiée n’est pas le seul à être nauséabond en ce printemps 2002.

La veille, à une heure du matin, à la Duchère, un quartier de Lyon, des antisémites ont lancé des voitures-béliers contre la synagogue Rav Hida avant d’y mettre le feu. Selon les témoignages, près de quinze individus cagoulés ont participé à l’attaque avant de prendre la fuite à la vue des flammes. Quelques heures plus tard, à Villeurbanne, toujours en région lyonnaise, un couple est pris à partie ; l’homme, portant une kippa, est roué de coups au sol. Les auteurs de cette agression antisémite se seront jamais retrouvés. À 21 heures, le même jour, dans la banlieue de Toulouse, des tirs éclatent contre la devanture d’une épicerie casher de la commune de L’Union. Le dimanche soir, des flammes surgissent de la rue du Chemin des Campanules dans le 12e arrondissement de Marseille : il ne reste rien des 200m2 de la synagogue construite en préfabriqués vingt ans auparavant et fréquentée par plus de 600 familles.

Au même moment, plusieurs individus entrent par effraction dans l’école primaire juive Tiferet Israël à Sarcelles dans le Val-d’Oise et commettent de nombreuses dégradations. Le 2 avril, les vitres de la synagogue de l’avenue Kennedy du Kremlin-Bicêtre volent en éclat : des bouteilles d’essence jetées à l’intérieur du lieu de culte Le 4 avril, des cocktails Molotov sont lancés à quatre heures du matin contre un bâtiment abritant une synagogue Mazel-Tov à Montpellier. Le 6 avril, les locaux d’une association sportive juive de Toulouse sont la cible de jets de pierre. Le 9 avril, la synagogue de Garges-lès-Gonesse (Val-d’Oise) est prise pour cible à son tour. Le 10 avril 2002, quatorze footballeurs de l’association Maccabi sont agressés à Bondy (Seine-Saint-Denis), à coups de barres et bâtons.

En pleine Pâque juive, ces actes prémédités provoquent la stupeur et l’indignation du Premier Ministre Lionel Jospin et du Président de la République, Jacques Chirac, tous deux alors en lice pour l’élection présidentielle. Le gouvernement annonce un renforcement de la sécurité des lieux de culte de la communauté juive. Le gouvernement décidé la mobilisation de plus de 1 100 hommes afin d’assurer la protection des écoles et des lieux de culte juifs. Au total, six compagnies de CRS et six escadrons de gendarmes mobiles ont été redéployés en France, en particulier à Strasbourg ou à Marseille, et dans dix autres grandes villes. Par ailleurs, la ministre de la Justice, Marylise Lebranchu, sensibilise les parquets en adressant aux magistrats des « instructions pénales d’extrême sévérité à l’égard de tout acte d’agression antisémite ou d’agression de caractère raciste à l’encontre de la communauté arabo-musulmane». Enfin, le ministre de l’Intérieur Daniel Vaillant mobilise « les services de police judiciaire (…) pour rechercher les auteurs des agressions et les remettre à la justice ».

Ces actes antisémites interviennent dans un contexte de grandes tensions au Moyen-Orient lié à la deuxième intifada et à la construction « d’une barrière de sécurité » du Nord de la Cisjordanie jusqu’à la région de Latroun. Il est à noter qu’aucun pays n’a connu autant d’agressions antisémites que la France. Pour sa part, le président de la communauté juive de Berlin dresse le constat suivant : « Le conflit du Moyen-Orient est bien commode pour maquiller leur antisémitisme en critique d’Israël ; l’antisionisme ou l’opposition à Israël servent d’exutoire à l’antisémitisme ».

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